Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Album de famille.

La vie c’est ….

La vie, normalement c’est ça : Un point A ————————— vers un point B. Sauf que Xavier, son problème, c’est le point B. La vie, c’est toujours aussi compliqué ! A 25 ans, on suivait les tumultes de sa vie d’étudiant expatrié dans l’Auberge Espagnole ; à 30 ans, il se décidait malgré tout à choisir une relation promise au bonheur avec la jolie Wendy dans les Poupées Russes et là, à 40 ans, c’est malheureusement sur le divorce avec Wendy que s’ouvre ce Casse-tête chinois de Cédric Klapisch.

 

Jeudi 5 décembre, séance de 10h20 au Pathé Wepler, Paris 18ème.

Peu de monde à cette heure là, c’est là que le chômage a ses avantages, il permet normalement d’aller voir les films qu’on attend depuis longtemps en toute tranquillité. Je dis normalement car ce serait sans compter sur le petit vieux qui malgré ses sympathiques sourires, a raclé sa gorge toute la séance durant, bruits de succion en bonus et pépite de la pépite, pour ma grande surprise, a aussi joyeusement lâché deux petits pets pendant le film… Et dire que d’habitude, je perds mon énergie à pester contre les bruits de pop corn ou les papiers de bonbons qu’on enlève si précautionneusement alors qu’il faudrait juste tirer d’un coup et ainsi gentiment abréger ma souffrance…

La vie est compliquée.

Enfin surtout pour mon pote Xavier. Oui j’ai décidé de l’inclure dans le cercle de mes amis tant j’ai l’impression de bien le connaître celui là. Toujours un peu indécis, il subit les aléas de la vie, les provoque sûrement un peu mais retombe assez bien sur ses pattes. Comment il va ? Et bien, plutôt mal d’abord. Parce que oui, tu vois, il vivait le parfait amour avec Wendy, -mais si tu sais, la très jolie rousse qu’il avait rencontrée pendant son année Erasmus à Barcelone-. Oui tu vois, ça a été assez dur pour lui de s’en rendre compte mais ils étaient à priori fait pour être ensemble. Bon voilà, ils ont eu deux enfants mais là, ça va plus. Et Wendy, elle a décidé d’aller vivre à New York. Oh elle abuse… Oui enfin bon, en même temps, elle vivait à paris depuis tout ce temps juste pour Xavier. Enfin voilà, Xavier, il veut pas reproduire les erreurs de son père donc il part vivre de l’autre côté de l’Atlantique juste pour être près de ses enfants. Oui, Xavier, il est toujours aussi beau et en plus il agit de façon encore plus charmante avec l’âge. Oui oui. Et ce qui est chouette c’est que Isabelle, tu sais sa super pote homosexuelle, et bien elle aussi, elle vit à New York… alors autant te dire que ce Casse-tête chinois a aussi des allures d’album de famille, et encore plus quand la pétillante Martine arrive et sème son grain de sel dans l’histoire…

J’ai aimé. Quel soulagement intense de voir que Cédric Klapisch s’est emparé de cette suite avec autant d’enthousiasme que les deux premiers volets ! Il faut dire qu’il y a mis les bons ingrédients. Ne serait ce que l’attente. Le temps. L’Auberge Espagnole sortait en salle en 2001 et depuis, les personnages ont eu le temps de grandir, de vieillir, et de nous manquer. L’absence a du bon. Cédric Klapisch affirme même avoir voulu attendre que ses comédiens vivent de nouvelles expériences dans leur propre vie afin de nourrir leurs personnages. Romain Duris notamment. « (…) je me disais que ce serait bien d’attendre que les acteurs aient des enfants dans la vraie vie, notamment Romain. Je n’aurais peut-être pas refait ce troisième film s’il n’avait pas eu d’enfants. » Et puis les comédiens voulaient à nouveau jouer ensemble sous la direction de Klapisch, et cette cohésion se ressent énormément à l’écran. Enfin, Klapisch a su garder toute l’originalité de son cinéma, et ne s’est pas désorienté face à la pression attendue devant une telle suite. Il a su adapter son écriture et a délaissé la spontanéité qui avait fait la fraîcheur des deux premiers opus pour se concentrer sur un scénario plus élaboré et plus mature pour Le casse-tête chinois. J’aime les cinéastes avec une « pâte », et j’aime définitivement le cinéma de Klapisch. Il sait user de stratagèmes visuels et affectionne toujours autant les astuces graphiques mais sait aussi parler avec simplicité de réalisme. Il sait filmer le quotidien et les gens tels qu’ils sont. Et créé des films miroirs. Pas étonnant que le programme Erasmus ait vu envoler son nombre d’adhésion dans l’année qui a suivi la sortie de l’Auberge espagnole, et avec ce troisième volet de la « trilogie des voyages de Xavier » comme il aime l’appeler, c’est toute la question d’une génération ayant grandi avec l’idée de mondialisation et du voyage qui est abordée. Pas de frontières, les citoyens du monde sont de retour.

Pour aborder New York, Cédric Klapisch a voulu travailler sur des codes couleurs très recherchés et s’est très vite inspiré du photographe Alex Webb de l’agence Magnum. « Pour moi, c’est un maître absolu dans l’art de décrire la vie comme un gros bordel tout en composant ses images de façon extrêmement sophistiquée. Je voulais utiliser ça visuellement parce que pour moi New York raconte le combat de l’ordre et du chaos qui ressemble étrangement aux problèmes de Xavier. »

Alex Webb, Havana, 2008
Les codes couleurs & cadrages compliqués d’Alex Webb ont inspiré le réalisateur du Casse-tête chinois (Alex Webb, Havana, 2008)
Alex Webb, Sancti Spiritus, 1993 (Boys and Bikes)
Alex Webb, Sancti Spiritus, 1993 (Boys and Bikes)

 

 

Humour & Mélancolie. Un brin de nostalgie. Beaucoup d’avenir. C’est désormais l’idée de la filiation, ces liens entre les générations qui animent Xavier, Wendy, Isabelle & Martine. Les clins d’oeil au passé sont parfois rieurs, et souvent mélancoliques. L’insouciance a laissé la place à la recherche de la stabilité. Si le scénario possède quelques facilités ou de petites incohérences, elles sont vite balayées par le ton ouvert et drôle du film. Et puis, point très important à mes yeux, je souligne avec grand plaisir, la construction d’une vraie fin qui clôture cette trilogie, rassasiant mon appétit de spectatrice. Car rien n’est plus crétin que de faire des suites dans l’optique de faire encore d’autres suites. Non ? S’il peut en dérouter certains par le changement de ton dans cette trilogie, pour ma part, ce Casse-tête chinois a déplié ses énigmes avec plaisir, laissant le sentiment joyeux d’avoir retrouvé des super potes. Un bel album de famille, en voyage…

 

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

Le Casse-tête chinois, Cédric Klapisch

 

 

Le site officiel du film

Le site de Cédric Klapisch

 

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