Au Bout du Conte, Agnès Jaoui

Il était une fois…le cinéma par le duo Jaoui & Bacri

Ne soyez pas déroutés si vous trouvez plusieurs ersatz de héros se côtoyer. Vous ne rêvez pas, vous croiserez dans cette histoire aussi bien le Chaperon Rouge, qu’une Cendrillon au masculin ou la marâtre de Blanche-Neige…et je ne fais qu’en citer trois. Autant vous dire que pour faire coexister tous ces personnages au caractère d’enfant unique, tout en les reliant à notre propre réalité, il valait mieux miser sur de bons piliers de création. Les bases de la légende en somme. Les conteurs en d’autres termes…Ah mais nous y voilà. Il était une fois deux dialoguistes de talent, deux acolytes de création, unissant chaque fois leurs pouvoirs pour faire de leurs idées de jolis bijoux aux multiples facettes…

Cela faisait longtemps que le duo (en tant que scénaristes) Agnès Jaoui & Jean-Pierre Bacri nous avaient laissés, après Parlez-moi de la pluie (que j’avais aimé sans conviction), attisant ainsi ma curiosité sur leur nouveau projet. Au bout du Conte m’a conquise. Très joliment. Très simplement. Quand la magie du quotidien prend une dimension mes-estimée… 

Il était une fois une jeune fille qui apprend à reconnaître le loup du Prince Charmant. 

Il était une fois une femme qui rêvait d’être comédienne mais qui en fait, était une bonne fée.

Il était une fois un homme aux airs grincheux réalisant qu’il pourrait être joyeux… 

Dans chaque instant de notre quotidien se cache un bout de conte. Voilà le propos de Jaoui & Bacri. Et la grande force de ce film tient justement dans l’instant. De petits dialogues, très bien écrits, des scènes, aux airs de déjà vécu, des attitudes, que chacun connaît… Beaucoup de détails, mis bout à bout, qui font que ce film, très bien monté, achève de nous conquérir. Avec le sourire, souvent. L’écriture du quotidien est ainsi parfaitement mise en valeur, toujours à l’affût du fil si ténu de la justesse.

Vous l’aurez compris, pas de jabots ou de crinoline d’antan dans ce film mais bien des considérations de nos jours. Et pourtant, ne se contentant pas d’effleurer l’idée de conte, ce film y plonge littéralement. Toujours par petites touches, jamais ostensibles mais bien visibles. A commencer par la narration du film, chapitrée comme lorsque l’on ouvre un livre avec un effet visuel transformant le film en tableau une fraction de seconde mais aussi à travers les décors, ultra-travaillés où le regard se perd pour y découvrir l’antre rêvée d’Alice, Blanche Neige et des autres. Les costumes également prennent tout leur sens dans cette histoire. Le manteau rouge d’Agathe Bonitzer cache une naïveté et une imprudence déjà bien connue, et lorsqu’arrive la pomme rouge à l’écran, on se dit que ce film ose décidément  toutes les parallèles sans jamais tomber dans le décor. Excitant !

Et la musique ? Pas de conte sans musique. Et là encore, le film fait le choix subtil de bercer ces histoires du quotidien par des chants classiques, des harmonies orchestrales et ritournelles enfantines ajoutant un versant solennel et unique, parfois régressif au film, achevant de nous faire plonger directement dans nos souvenirs lointains. Au bout du conte, en toute humilité, nous voilà transportés dans une histoire qui a tous les aspects d’une fable moderne…

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Et même si j’entends déjà dire que Jaoui et Bacri se répètent, je soupirerai un temps puis passerai sur le fait que oui, on les trouve exactement comme on les attend mais que malgré tout, cela fonctionne. Et que l’on prend même un malin plaisir à les voir réunis ensemble à l’écran.

Il était une fois deux complices de création qui s’étaient créés des personnages de fiction tellement réels qu’ils leur collaient à la peau, à tel point qu’Au bout du Conte,  on ne savait plus où la fiction de la réalité commençait…

au bout du conte cinema critique
Agathe Bonitzer dans Au bout du Conte

4 réponses sur “Au Bout du Conte, Agnès Jaoui”

  1. Bon allez, depuis le temps que je l’ai sur mon ordinateur, je vais le regarder, histoire de critiquer même si j’adore ce duo (pour de vrai), leur dernier film avec Debbouze m’avait légèrement déçue. J’aimerais tellement qu’ils reviennent à leurs films tels que « Cuisine et dépendances », « Un air de famille » ou encore « Le goût des autres »…

    1. Moi aussi j’avais été déçue par le film avec Debbouze, trop lent, trop caricatural, trop… Celui ci m’a vraiment étonnée et plu. Tu me diras ce que tu en as pensé.

      1. Voilà, j’ai visionné le film et je l’ai apprécié finalement. Benjamin Biolay m’a passablement énervée mais bon c’était son rôle 😀 Je retiens deux phrases dans ce film, celle où Agnès Jaoui dit qu’elle croit en tout ce qui fait du bien (je ne sais pourquoi mais ça me parle), puis celle où le fils de Bacri dit à ce dernier qu’il ne peut guère lui demander autre chose que de l’argent, c’est lourd de sens et assez fin comme réflexion je trouve. Pour Agathe Bonitzer, je dois avouer que je la trouve un peu transparente, je l’ai vu dans d’autres films et j’ai du mal à accrocher avec elle. Enfin, je trouve Bacri particulièrement touchant dans son rôle du type qui ne croit à rien mais finit par être bouffé parce qu’on lui a dit il y a 20 ans qu’il mourrait tel jour ; peu à peu il reconnaît que ça lui réellement peur, qu’il commence à y croire, il s’écroule et on découvre un humain. Voilà, je ne dis que des banalités mais c’est ce que ce film m’a inspiré. Une histoire sympathique, contemporaine malgré les décors, l’ambiance, etc. Un film qui me parle en somme. (désolée pour ma critique de comptoir, je ne suis pas très douée pour cet exercice).

        1. Moi je trouve qu’il n’y a pas de critique de comptoir, surtout quand on use d’exemples bien précis comme tu le fais !! Je suis d’accord avec toi, ce film m’a surtout parlé car il véhicule des idées, des sentiments très contemporains (& quotidiens), tout ça dans un contexte complètement anachronique, tant par les décors, que les ficelles de l’histoire… J’ai trouvé l’exercice vachement bien relevé et du coup, j’étais, il faut le dire, aussi très contente de retrouver le duo Jaoui-Bacri en grande forme. 😉

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