Have you met… Peggy, démêleuse de projets culturels ?

&… tisseuse de jolis projets culturels.

Bonjour à vous, petits toqués de culture ! Dans la famille des métiers culturels, je demande l’organisation de projets culturels ! Vous savez, cette frange de la profession aux dix bras et cinq cerveaux, ceux issus des fameuses études de médiation culturelle… Problème épineux, on se demande souvent, et à juste titre, ce que font ces personnes. Pour quels postes sont elles formées ? Si vous faites des études pour être dentiste, vous devenez …dentiste. Facile. Ici, la formation ne mène pas à un métier mais à une palette de compétences. D’où la difficulté de se créer son métier, de le nommer et de l’apprécier sans s’y perdre.

J’en parle à juste titre puisqu’après mes études de cinéma à la fac, j’ai bifurqué vers une licence de médiation culturelle en alternance. Et j’y ai rencontré Peggy. Sa personnalité, métissée et foisonnante, m’a tout de suite plu. C’est une personne très débrouillarde, et qui adopte toujours le bon point de vue avec lequel il faut aborder un projet culturel naissant. Certains diront qu’elle fait de la production & diffusion de spectacles, moi je la préfère tisseuse de projets

 

Portrait de Peggy, interview par le blog Esperluette (Photo Elodie Ravaux)

 

 

Bonjour Peggy ! Pour commencer cette rencontre, peux tu nous livrer 3 curiosités te concernant ?

J’aime la tarte au citron.

J’habite un 6ème étage avec accès secret sur les toits de Paris.

Je photographie la vue de mon balcon à toutes les heures du jour, dès que la lumière est belle.

 

Exercice difficile, pourrais-tu nous résumer ton métier en 1 phrase ? 

Je ne suis ni médiatrice culturelle, ni administratrice, ni chargée de communication-diffusion-production-…, mais un peu tout ça à la fois.

 

D’où te vient cet attrait pour la culture et surtout le fait de vouloir y travailler ? Etais tu entourée de personnes créatives et inspirées étant petite ?

Ma mère a toujours su prendre le temps de s’arrêter pour regarder ce qu’elle trouvait beau, elle m’a transmis cette sensibilité à observer je crois.

Et puis après avoir passé du temps dans d’autres pays pendant mes études, la culture est devenue un endroit, comme le voyage, qui m’a semblé important pour apprendre à déplacer le regard et bousculer ses évidences.

 

Quelles ont été tes études ? 

J’ai fait une classe préparatoire littéraire, puis je suis partie en Erasmus à Berlin. Par le hasard de rencontres, j’ai ensuite passé une année à San Juan, dans le nord de l’Argentine, inscrite dans une Fac de Lettres. Je suis arrivée à Paris en 2006. J’ai étudié 1 année à l’IESA – Institut des Etudes Supérieures des Arts (où j’ai rencontré Esperluette !) et 2 ans à la Sorbonne Nouvelle – Paris 3 : en Master 1 de Médiation culturelle et en Master 2 d’Ingénierie des Echanges Interculturels.

 

Que te reste-t-il aujourd’hui de ces études en médiation culturelle ? 

La capacité d’adaptation à différents métiers du secteur culturel et la curiosité qui me permet d’être touche-à-tout.

 

Un conseil pour tous ceux qui s’y lancent encore aujourd’hui ?

On ne termine pas ces études avec un diplôme en poche qui nous dit pour quel type de poste on est formé, alors il faut trouver le domaine du secteur culturel qui résonne avec sa propre sensibilité, ou les compétences dont on souhaite faire son métier. Pour ma part, j’ai choisi un domaine, je travaille dans le théâtre avec un profil assez polyvalent, et avec le temps je définis un peu mieux les contours de mon métier.

 

Et qu’est ce qui t’a poussée à travailler au service des petites compagnies ? 

C’est le hasard d’une rencontre avec une jeune compagnie, dans l’urgence de trouver quelqu’un pour une mission de diffusion autour d’un spectacle programmé à Paris. J’ai aimé l’autonomie que m’offrait un tel poste, la rigueur et la créativité qu’il demande pour inventer un cadre de travail. (ndlr : Peggy travaille pour la compagnie de mime et théâtre contemporain Hippocampe)

 

L’art du geste, le mime… ce sont des arts qui manquent de visibilité, est ce dur de les mettre en valeur auprès des diffuseurs ?

C’est passionnant car cette discipline est en train de se structurer professionnellement. Il n’existe pas encore de ‘case’ pour le mime alors il faut réfléchir à qui on est et comment on le raconte. Ce travail de définition, c’est ce que j’aime faire ; c’est le moment où rien n’est établi, où la seule méthode possible c’est de se poser des questions.

 

Interview culture avec Peggy par Esperluette
La Chambre de Camille, Cie Hippocampe / Visuels ©Stéphanie Hoyakem / Photos ©Séverine Bourgeois

 

Interview culture & projets culturels par le blog esperluette
Les Collectionneurs ©Gilles Dantzer / Nouveau spectacle de la Cie Hippocampe
Interview culture & projets culturels par le blog esperluette
Les Collectionneurs ©Peggy Riess / Nouveau spectacle de la Cie Hippocampe

 

Interview culture avec Peggy par Esperluette
Spectacle Entrevus, Cie Hippocampe / Photo ©Ricardo Reis

Ton emploi du temps au quotidien, ça ressemble à quoi ?

Mon emploi du temps varie beaucoup. J’essaie de trouver un équilibre entre les différents projets pour lesquels je travaille.

 

Une chose que tu aimes plus que tout dans ton boulot ?

J’aime trouver de la cohérence et du sens. Qu’il s’agisse d’un texte à rédiger ou d’un tableau excel à construire, j’aime assembler les pièces d’un puzzle. J’aime observer et tenter de trouver les mots justes pour retranscrire une idée. J’aime aussi lorsqu’une idée nouvelle naît au croisement de plusieurs sources d’inspiration ; on se rend alors compte qu’il est possible de sortir des cadres pour créer quelque chose de nouveau.

 

Et une qui t’énerve ?

Lorsqu’on tient un discours haut perché, incompréhensible, qui donne l’impression que le théâtre n’est pas fait pour tout le monde – et ce n’est pas toujours facile d’éviter ce piège là quand on parle d’un projet artistique…

 

Est-il difficile de trouver sa place par rapport aux artistes quand on occupe ton poste dans une compagnie ? J’imagine qu’il doit y avoir un travail permanent de rééquilibrage entre le travail administratif et celui de création… 

J’ai besoin d’échanger sur le travail artistique afin de faire passer l’univers des artistes à travers le filtre de ma sensibilité et de mes compétences ; on peut ainsi trouver un terrain de travail commun, une cohérence dans la manière de mener un projet et de construire petit à petit l’identité d’une compagnie.

 

Et la volonté pour ces compagnies d’obtenir des résultats (trop) rapidement ?

Les résultats ne viennent pas immédiatement, alors j’essaie de créer des outils qui permettent de mesurer le travail accompli, à la fois pour moi et pour les artistes avec lesquels je travaille. Il faut se donner les moyens de travailler à long terme. L’enjeu économique est compliqué.

 

Où travailles tu ? 

Je travaille en partie au bureau et en partie chez moi. C’est facile de poser les horaires mais ce n’est pas toujours facile de déconnecter.

 

Et ton statut ? 

C’est un peu une course. Il faut sans cesse s’assurer d’une activité assez rentable pour produire ses propres revenus. C’est un endroit d’insécurité pas toujours facile à vivre.

 

As-tu d’autres projets en perspective ?  

J’aimerais créer un jour ma propre structure pour accompagner des personnes qui décident de porter un projet personnel et d’en faire leur métier. Ce que j’aime faire c’est démêler les fils d’une idée, questionner sa pertinence et trouver les arguments qui vont l’ancrer dans la réalité, chercher les mots et la forme justes.

Je souhaite pouvoir sortir de temps en temps du milieu artistique et travailler avec des porteurs de projets d’autres secteurs, pour ne pas perdre de vue cet exercice qui consiste à se voir à travers le regard de quelqu’un d’autre pour ne pas s’enfermer. Et puis j’ai moi aussi des projets derrière la tête, qui prendront le temps qu’il faut pour mûrir avant d’exister…

 

Interview culture & projets culturels par le blog esperluette
Interview culture avec Peggy par Esperluette

 

 

 

Fais ton choix ! Et dis nous pourquoi !

Soirée 1/Cinéma, pop corn et bistrot

Soirée 2/Concert, bar à vins et invitation à la danse

Soirée 3/Restaurant d’amis et Théâtre contemporain

Ce serait plutôt Cinéma, Bistrot, et Invitation à la danse. Cinéma parce que j’aime échapper un peu au théâtre lorsque je vais au cinéma ; Bistrot parce que ça fait moins sérieux que le bar à vin – même si on y boit du vin – et Invitation à la danse parce que j’aime décidément beaucoup ça quand la musique fait danser !

 

1 ou 2 artistes qui t’inspirent, que tu affectionnes ?

J’aime voir les spectacles de la compagnie belge TG Stan. Je sens de la sincérité et de la spontanéité dans leur travail qui parle de chacun de nous, de nos relations avec les autres, de notre société. J’ai l’impression qu’ils cherchent qui l’on est derrière les conventions, les paravents qu’on se construit. J’ai lu un article où on les décrivait comme des ‘travailleurs de la scène’ ; j’aime cette idée du théâtre qui se fabriquerait à force d’efforts, comme un artisan travaille une matière selon une technique, pour lui donner une forme nouvelle.

J’aime aussi le travail de François Cervantes, auteur et metteur en scène qui collabore avec des clowns. Il cherche lui aussi un théâtre qui parle de nous.

 

Le dernier spectacle, concert, livre… que tu as aimé ?

J’ai lu le deuxième tome de la BD de Sylvain Mazas : Ce livre devrait me permettre de résoudre le conflit au Proche-Orient, d’avoir mon diplôme et de trouver une femme.

Je me suis retrouvée dans son envie de changer le monde avec une méthode bien à lui.

 

Merci beaucoup Peggy d’avoir pris le temps de me répondre ! 

 

La compagnie Hippocampe

Elodie Ravaux, photographe > allez y faire un tour, je recommande vivement, son travail est magnifique.

Stéphanie Hokayem, graphiste

TG Stan

François Cervantes, auteur et metteur en scène

Sylvain MazasCe livre devrait me permettre de résoudre le conflit au Proche-Orient, d’avoir mon diplôme et de trouver une femme. (BD)

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