Robert Mapplethorpe, Grand Palais

Histoire d’un photographe qui se rêvait sculpteur…

Direction le Grand Palais dans la galerie Sud Est, pour aller voir l’exposition consacrée à Robert Mapplethorpe. Créateur d’images, photographe passionné par l’image du corps et de sa sexualité, à la recherche constante de la forme. Du relief. Des contours. Et qui aurait pu être sculpteur, si il « était né il y a cent ou deux cents ans »… On connait souvent de Mapplethorpe ses clichés de nus, tant il était fasciné par cette corrélation entre le sexe & l’Art. Mais c’est à son oeuvre toute entière que le Grand Palais veut faire honneur en nous livrant une rétrospective générale, avec environ 250 oeuvres allant de ses portraits de nus, aux photos fétichistes, des natures mortes de fleurs (très sexuelles) aux portraits d’artistes.

Et le musée fait le choix de commencer par la fin. Clin d’oeil à la construction du livre de Patti Smith sorti en 2010, qui conte cette relation qu’elle a entretenue avec le photographe, à la fois muse, amoureuse, fraternelle & amicale. C’est donc sur l’autoportrait à la tête de mort si connu de Mapplethorpe que l’expo débute, percutant le spectateur de la mort inévitable & prématurée de l’artiste. Au 1er plan, une tête de mort qui orne le pommeau d’une canne, et Mapplethorpe qui ne la regarde pas, mais qui nous la brandit. Un geste brut, métaphore de son oeuvre.

« Je cherche la perfection dans la forme. Dans les portraits. Avec les sexes. Avec les fleurs. » Robert Mapplethorpe, entretien avec Barbara McKenzie, 1985

Photo & Sculpture. Voilà ce que je retiendrais de l’oeuvre de Robert Mapplethorpe. Je ne connaissais jusqu’à présent que très mal cet artiste. J’ai aimé la dualité qui imprègne son travail. La recherche des liens entre les arts et notamment la sculpture. Modeler les corps, l’amour des lignes formées par la nudité, pour chercher les formes, les contrastes qui feront de l’image une impression de relief. Ses portraits d’hommes noirs sont les photos que j’ai préférées, parce que c’est là que l’on devine le plus le regard de Mapplethorpe sur son sujet. Parce qu’elles sont graves. Sa recherche des formes et sa volonté de confronter tous les sujets de ses créations pour en tirer des liens sont des pistes très intéressantes. Ainsi, pour lui, photographier des sexes ou des fleurs revient au même…

« J’ai une admiration sans limite pour le corps nu. Je le vénère… »

Issu du mouvement de l’underground new-yorkais des années 70/80, Robert Mapplethorpe s’inscrit dans une démarche vraiment libertaire. Il a eu des muses féminines mais c’est surtout pour les figures masculines qu’il s’est passionné. Dans son art comme dans sa vie privée. J’ai aimé le reflet qu’a donné son homosexualité à ses oeuvres, mais j’ai regretté que l’exposition ne nous donne pas plus d’informations sur les retombées et l’acceptation de ces photographies en son temps…

Scénographie à rebours. Le seul point qui me chagrine dans cette exposition, c’est finalement sa scénographie. Pas tant au niveau des cadrages ni des lumières car la mise en scène est chic et ordonnée, bien éclairée et aux teintes joliment calfeutrées. Non. L’embêtant est finalement de commencer par les images les plus percutantes, coupant d’emblée l’effet d’amplification du phénomène Mapplethorpe. Car comme tous les artistes, il s’est cherché et a mis quelques années à définir son style, à trouver ses thèmes d’accroche les plus porteurs ; et l’exposition choisit de commencer par ses plus beaux tirages pour finir par les plus anodins, les plus brouillons. Et nous laisser repartir avec ces derniers clichés en tête. Ce qui pouvait être une bonne idée m’a en fait plus perturbée. Et c’est sûrement du au fait que j’étais novice sur le sujet. J’ai d’ailleurs regretté la place pâlotte accordée à la figure de Patti Smith, que j’aurais aimé plus présente. Comme un guide, pour donner plus de relief à la scénographie…

Et c’est d’ailleurs la dernière pause avant de partir de l’exposition qui confirmera mon pressentiment, lorsqu’on nous donne la biographie de l’artiste juste avant notre départ. Définitivement, cette exposition mérite votre déplacement mais potassez votre sujet avant la visite car ce n’est pas la scénographie de l’expo qui vous guidera !

Sachez enfin que le Musée Rodin profite de cette rétrospective pour consacrer une exposition entière au lien entre l’oeuvre de Mapplethorpe et celle de Rodin, une chouette continuité du propos déjà amorcé au Grand Palais ! Et c’est jusqu’au 21 septembre. (Métro Varennes)

Robert Mapplethorpe, Grand Palais, jusqu’au 13 juillet 2014 (Plein tarif 12€, Tarif réduit 9€) Attention, une partie des oeuvres est interdite d’accès aux moins de 18 ans & d’autres oeuvres ouvertes au libre public peuvent choquer le jeune public…

 

Exposition Robert Mapplethorpe, Grand palais

Exposition Robert Mapplethorpe, Grand palais
Lisa Lyon, Robert Mapplethorpe
New York, Solomon R. Guggenheim Museum Don de la Fondation Robert Mapplethorpe en 1993 © Robert Mapplethorpe Foundation. Used by
permission
Exposition Robert Mapplethorpe, Grand palais
Patti Smith, Robert Mapplethorpe, New York, Fondation Robert Mapplethorpe
© Robert Mapplethorpe Foundation. Used by permission
Exposition Robert Mapplethorpe, Grand palais
Self-portrait (Autoportrait), Robert Mapplethorpe, New York, Solomon R. Guggenheim Museum Don de la Fondation Robert Mapplethorpe en 1996
© Robert Mapplethorpe Foundation. Used by permission
Exposition Auguste, Grand Palais
En repartant de l’expo Mapplethorpe, le pas de porte de l’expo Auguste. Sympa la scéno !

 

Le site du Grand Palais, l’interview de Ken Moody, un des modèles de Mapplethorpe

Just Kids, de Patti Smith, Ed. Gallimard, Coll. Folio 

Patti Smith parle de l’expo Mapplethorpe pour Télérama

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