Polar mélancolique inachevé.
C’est l’histoire de Luke, un gars un peu paumé, motard surdoué qui vend ses talents dans un numéro itinérant spectaculaire de motos en cage. Lorsqu’un un jour il retrouve une ex petite amie, il découvre à ses dépens qu’elle élève seule leur fils. Son fils. Luke décide alors qu’il va subvenir à leurs besoins… quitte à avoir recours à la méthode la plus primitive, celle des braquages et du délit…
Ryan Gosling. Un personnage mystérieux, au regard mélancolique et pas prolixe pour un sou. Cela ne vous rappelle rien ? Un petit effort ! Ajoutez à cela des plans longs et appuyés, une lumière qui enveloppe le charme sombre de Ryan Gosling jusqu’à le rendre solaire. Alors ? Oui, on y est. Drive. C’est que l’objet de la convoitise de Nicolas Winding Refn a attiré Derek Cianfrance, car le Luke de The Place beyond the Pines a sûrement hérité de quelque lien de cousinade avec le conducteur au cure-dent de Drive… Mais la ressemblance s’arrête là. Luke est plus amer, plus brut aussi, comme si les écorchures de son adolescence ne s’étaient jamais refermées. Ca commence avec les tatouages qu’arbore son corps, futiles, immatures et grotesques. Et c’est surtout le cas lorsque le gaillard décide d’assumer son rôle de père et prend le raccourci fatidique de braquer des banques pour gagner de l’argent afin de subvenir aux besoins de son fils, et aussi récupérer le coeur de son ex petite amie remise en couple…
The place beyond the Pines, c’est comme une fresque noire en trois actes. Un premier chapitre aussi fougueux que le personnage de Ryan Gosling, emmené par sa fureur d’avancer et la violence de ses actes. La quête de son fils et de Romina (Eva Mendès, touchante) en figure de proue. Poignant et bouleversant. Jusqu’à la mort de Luke. Assassiné par un flic ambitieux, joué sans faute par Bradley Cooper, qui se verra alors porté en héros. Et là malheureusement, le scénario se fait la malle… laissant les deux derniers chapitres s’écrouler, engloutis par trop d’ambition. Les ellipses temporelles sont mal placées et ne justifient pas pour autant les avancées dans le temps, beaucoup trop audacieuses. Si le deuxième chapitre peine à nous peindre comme il faut Avery, le flic joué par Bradley Cooper, nous laissant circonspects devant son avancée fulgurante sur l’échelle du pouvoir et de la politique, il oublie aussi d’expliquer en profondeur ses états d’âme pourtant au centre de la construction de son personnage. Rongé par le fait d’avoir tué Luke. Et coupable d’avoir laissé quelque part un fils grandir sans son père…
Alors lorsque le troisième chapitre clôture l’histoire sur un Bradley Cooper au sommet après avoir gravi les échelons du pouvoir grâce à son image de héros et avance la rencontre (tellement attendue) des fils de Avery et de Luke quinze ans après, là, on se dit que les 2h20 du film ne suffiront pas à rattraper les détails manquants d’une histoire qui ne prend pas.
The place beyond the Pines est définitivement un endroit mystérieux qui attire. L’american way of life y est trash et les codes intelligemment bousculés. Un charme mélancolique hélas pourri par un scénario qui s’effrite et ne tient pas la longueur. Dommage…
Mais je n’en resterais pas là ! J’ai lu que le précédent opus de Derek Cianfrance Blue Valentine était magnifique, je m’en vais de ce pas me pencher dessus …